La sauvegarde de justice est une mesure de protection juridique. Parmi toutes celles qui existent, c’est la plus légère et la plus courte de toutes. Elle permet de venir en aide à un proche en perte de capacités physiques et/ou mentales pendant une courte période. La procédure de sauvegarde de justice cesse lorsque la personne a recouvré ses capacités ou lorsque la sauvegarde de justice est remplacée par une mesure plus contraignante comme la curatelle ou la tutelle.
Qu’est-ce qu’une sauvegarde de justice ?
Dans le Code civil, la sauvegarde de justice est prévue par les articles 433 à 439 et est définie de manière précise. En pratique, il s’agit d’une décision assez légère qui laisse à la personne âgée protégée la possibilité d’exercer ses droits. Elle peut ainsi accomplir les actes de la vie civile classiques, hormis ceux confiés au mandataire spécial lorsqu’il est nommé.
💡 Qu’est-ce qu’un mandataire spécial ?
Un mandataire est une personne désignée par le juge pour protéger les intérêts de la personne âgée. Le juge définit les actes précis qui sont confiés au mandataire, ils portent sur la gestion du patrimoine et/ou de la personne âgée. Par exemple, l’assister dans la vente de sa maison ou dans un placement boursier. Le mandataire peut être un proche de la personne âgée ou un professionnel gérant de tutelles qui ne fait pas partie de sa famille (personne physique ou association)
Lorsque les actes accomplis par la personne âgée sont contraires à ses intérêts, le mandataire de justice peut les contester et en demander soit l’annulation, soit la correction. C’est par exemple le cas lorsque le majeur fait l’acquisition d’un bien immobilier très onéreux qui lui porte financièrement préjudice.
On distingue plus particulièrement deux catégories de mesures de sauvegarde de justice. Celle qui est prise judiciairement par le juge des tutelles et celle qui fait suite à une déclaration médicale. Cette distinction est importante puisqu’elle conditionne les démarches à réaliser.
Sauvegarde de justice médicale et judiciaire
Il existe deux types particuliers de sauvegarde de justice : l’un fait suite à une décision prise par le juge des tutelles tandis que l’autre intervient sans l’intervention d’un juge, à la demande d’un professionnel de santé.
Cas 1 : Quelle procédure pour une sauvegarde de justice décidée par le juge ?
La mesure peut dans un premier temps être décidée par le juge des contentieux de la protection (anciennement appelé « juge des tutelles ») lorsqu’un parent ou un proche en fait la demande. Cela, dans les mêmes conditions que pour une demande de mise sous curatelle ou tutelle. Seules les personnes suivantes peuvent en faire la demande :
- la personne âgée elle-même
- Son epoux/épouse, son partenaire de pacs ou son concubin
- un parent ou une personne très proche, autrement dit qui a des liens résultant du mariage (belle-mère, belle-sœur, beau-frère) ou un ami de longue date qui entretient avec la personne âgée des liens stables et étroits (qu’il faudra démontrer)
- le curateur ou le tuteur si la personne âgée est déjà placée sous tutelle ou curatelle. Il est en effet possible de demander à placer la personne âgée sous une mesure de protection plus souple lorsqu’il apparaît que la curatelle ou la tutelle n’est plus nécessaire
- le Procureur de la République, qui agit au nom de la société
- un professionnel de la santé : directeur d’établissement de santé ou médecin.
Lorsqu’il analyse le dossier, le juge tient compte de la situation particulière à laquelle le majeur est confronté au quotidien et le niveau d’altération de ses facultés personnelles. Lorsqu’il apparaît que le degré d’altération est léger ou modéré, il peut décider d’un placement sous mesure de sauvegarde de justice.
Pour établir le dossier de demande de sauvegarde de justice, il est nécessaire de joindre les pièces suivantes (seulement des copies, pas des originaux) :
- acte de naissance de la personne âgée, de moins de 3 mois
- pièce d’identité de la personne âgée à protéger et du demandeur (recto-verso)
- certificat médical circonstancié, établi par un professionnel de santé inscrit sur la liste des médecins agréés par le juge
- formulaire de demande Cerfa n°15891 dûment rempli.
Cas 2 : Quelle procédure pour une sauvegarde de justice médicale ?
La mesure de mise sous sauvegarde de justice peut également faire suite à une demande d’un professionnel de santé. On parle alors ici de sauvegarde médicale. La demande est toujours faite par un professionnel de santé auprès du Procureur de la République :
- soit par le médecin de la personne âgée à protéger, auquel cas la demande doit s’accompagner de l’avis conforme d’un psychiatre
- soit par le médecin de la personne âgée à protsoit par le médecin qui officie dans l’établissement de santé (ex : à l’hôpital) au sein duquel se trouve déjà la personne âgée.
Bien qu’une sauvegarde de justice médicale soit également une mesure de protection juridique, le juge des tutelles n’intervient pas pour sa mise en place. Seul le Procureur de la République valide la demande lorsqu’il constate que le dossier est complet et justifié. La mesure de sauvegarde médicale a l’avantage d’être mise en place très rapidement. Ses effets sont les mêmes que pour la sauvegarde de justice décidée par un juge des tutelles.
- Le médecin ne peut pas décider pour et à la place de la personne âgée.
- Enfin, la durée de la mesure est d’un an, avec la possibilité de la renouveler pour une année supplémentaire, sans possibilité d’aller au-delà.
Sauvegarde de justice et recours
Cas d’une sauvegarde de justice médicale
Lorsque la personne âgée est placée sous sauvegarde de justice parce qu’un médecin en a fait la demande, la personne âgée peut exercer un recours pour contester cette décision. Elle demande alors à être retirée des listes sur lesquelles sa sauvegarde de justice est inscrite.
La demande est à formuler auprès du procureur de la République, en y joignant l’ensemble des documents démontrant que cette mesure ne répond pas à ses besoins réels.
Cas d’une sauvegarde de justice décidée par le juge
Si la mesure est décidée par le juge des contentieux et de la protection, la personne âgé n’a aucune possibilité d’exercer un recours puisque la sauvegarde n’implique pas de modification de ses droits en tant que tels.
Mise sous sauvegarde de justice personne âgée : qui peut agir en représentation ?
Qui peut représenter la personne âgée protégée dans le cas d’un placement sous sauvegarde de justice ? Le juge des tutelles désigne un ou plusieurs mandataires qui auront pour rôle d’accomplir certains actes en particulier, comme conseiller la personne âgée dans certains de ses choix ou agir à sa place dans certains cas précis. La mission confiée au mandataire dépend de la protection que nécessite la personne âgée. Il pourra par exemple s’agir de protéger le majeur lors de la vente de sa maison devant le notaire ou dans le cadre d’un investissement en bourse. Le juge se tourne prioritairement vers les proches du majeur : son époux, ses enfants, ses frères et sœurs. Lorsque cela n’est pas possible, le juge désigne un mandataire professionnel inscrit sur la liste du département dans lequel réside la personne à protéger. Lorsqu’il est nommé, le mandataire professionnel doit rendre des comptes pour prouver la bonne gestion du patrimoine de la personne âgée et de la bonne exécution de son mandat.
Face à la perte d’autonomie d’un proche âgé, la mesure de sauvegarde de justice ne suffira peut-être pas. Il vous faudra vous entourer d’outils clés pour communiquer au quotidien et garder le lien avec votre proche âgé. LiNote vous facilite la tâche avec des appels visio simplifiés conçus pour les personnes âgées qui ne maîtrisent pas l’usage des nouvelles technologies. Plus besoin de toucher l’écran, l’appel visio démarre par un simple rapprochement physique devant l’écran. De cette manière, vous vous assurez que votre proche va bien et pouvez lui envoyer des messages et des photos en plus des appels, pour ne jamais perdre le contact.
Délai d’obtention d’une sauvegarde de justice
Une fois que la demande de placement sous sauvegarde de justice a été envoyée au juge des tutelles, la période d’instruction se déclenche. Pendant ce délai, le juge examine le dossier et prend une décision. Il s’agit de laisser le temps suffisant pour que le juge auditionne la personne âgée et son entourage (les membres de sa famille proche). Il peut également réaliser une enquête sociale et solliciter le médecin traitant de la personne à protéger afin de recueillir son avis. Il faut donc compter plusieurs mois de délai d’instruction, avec une limite d’un an. Si le juge n’a pris aucune décision au-delà d’un an, la demande de sauvegarde de justice est considérée comme rejetée.
Sauvegarde de justice en urgence
Pendant la phase d’instruction de la demande, la personne âgée n’est placée sous aucune protection, ce qui pose parfois des difficultés quand sa situation devient problématique. Si l’urgence le réclame, le juge peut prendre des mesures urgentes destinées à maintenir la sécurité de la personne âgée. Il peut ainsi ordonner une sauvegarde de justice dès réception de la demande, même avant d’avoir auditionné le majeur, lorsqu’il l’estime nécessaire et impérieux au vu de la situation. Si tel est le cas, le placement dure pendant la phase d’instruction, jusqu’à ce que le juge des tutelles rende sa décision finale.
A l’issue, soit le juge place la personne âgée sous sauvegarde de justice soit il refuse la demande. S’il décide de cette mesure, il peut désigner un mandataire spécial ou ne pas en désigner.
Effets de la mesure de sauvegarde de justice
La personne âgée majeure sous sauvegarde de justice continue d’exercer librement ses droits. Elle peut par exemple ouvrir seule un compte bancaire, administrer son patrimoine, vendre son bien immobilier devant un notaire et percevoir des ressources (sauf si le juge a spécifié le contraire lors de la mise en place de la sauvegarde de justice).
En revanche, la personne âgée ne peut pas divorcer sans accord préalable de son mandataire. L’objectif de la sauvegarde de justice (qu’elle soit médicale ou judiciaire) est de contrôler les actes les plus importants de la vie de la personne âgée.
Une sauvegarde de justice rétroactive permet au mandataire d’exercer un contrôle sur les anciens actes réalisés par la personne âgée et qui seraient de nature à lui porter préjudice. Si tel est le cas, le mandataire peut demander l’annulation de l’acte jugé préjudiciable, comme la vente d’un logement faite sur un coup de tête ou des achats manifestement disproportionnés par rapport au train de vie de la personne. Autrement dit, une personne placée sous sauvegarde de justice a une liberté normale dans les actes de sa vie quotidienne, avec un contrôle de ses actes a posteriori et une annulation si nécessaire.
En outre, le juge des tutelles peut désigner un mandataire spécial qui aura une mission spécifique sur un aspect de la gestion des biens du majeur âgé. Cela peut par exemple être de recevoir les revenus du majeur et payer les charges, accepter une succession, mettre son logement en location … Le majeur protégé n’aura alors pas le droit d’accomplir les actes concernés sans l’aval du mandataire spécial.
Rôle du mandataire dans une sauvegarde de justice
Si le mandataire est un proche :
Une fois nommé, le mandataire doit informer la banque de la personne âgée protégée en joignant une copie de l’ordonnance établie par le tribunal.
Si le mandataire est un professionnel :
Lorsque le juge a décidé de nommer un professionnel pour remplir ce rôle (on parle alors de “mandataire spécial”), le mandataire doit rendre davantage de comptes puisqu’il est rémunéré pour sa mission. Il prend en charge une partie de la gestion du patrimoine de la personne âgée. C’est le juge qui définit quels actes font partie ou non de son champ d’action.
Le mandataire établit un compte de gestion et y joint l’ensemble des documents justificatifs appuyant ses actions. Le compte-rendu de gestion est à faire chaque année lorsque la mesure dure plus d’un an, ou bien à l’issue de la période d’un an quand elle n’est pas renouvelée. Le mandataire remet le compte-rendu au greffier du tribunal judiciaire qui se charge de vérifier les documents joints et la bonne réalisation de la mission dévolue.
Lorsque sa mission prend fin, le mandataire remet au greffier une copie du compte de la personne âgée protégée désormais reconnu comme capable, ainsi qu’à ses héritiers si la personne âgée décède.
Si la sauvegarde de justice se transforme en une nouvelle mesure de protection juridique (tutelle ou curatelle), le mandataire remet la copie du compte de la personne âgée protégée au nouveau protecteur (tuteur ou curateur) nommé par le juge.
Sauvegarde de justice, tutelle ou curatelle : que choisir ?
Lorsqu’un parent possède des capacités physiques et/ou mentales altérées, la question se pose bien souvent de savoir quelle mesure de protection juridique choisir. Si la sauvegarde de justice est la mesure la plus légère, elle n’est pas toujours la plus adaptée à la situation vécue. Il apparaît donc indispensable de s’informer au mieux pour savoir vers quelle mesure s’orienter en priorité :
Mesure de sauvegarde de justice
Elle concerne des personnes qui perdent leur autonomie de manière temporaire. En effet, une sauvegarde de justice n’a pas vocation à durer. Elle est prononcée pour une année, renouvelable une seule fois (soit 2 ans au maximum).
Curatelle
Elle concerne ceux qui nécessitent une assistance plus approfondie et continue dans les actes civils importants du quotidien.
Tutelle
C’est la mesure la plus complète et stricte que le juge peut prononcer. La tutelle est la solution lorsque la curatelle et la sauvegarde de justice sont insuffisantes pour protéger le majeur. Il s’agit alors de représenter la personne âgée en continue face à une altération conséquente de ses facultés mentales ou physiques inscrite de manière durable dans le temps.
Les effets de la mesure choisie diffèrent donc beaucoup. La sauvegarde de justice laisse au majeur protégé tout le champ libre pour accomplir les actes de la vie courante, hormis ceux qui doivent être effectués par le mandataire. La sauvegarde de justice est généralement déclarée en urgence et de manière toujours temporaire, contrairement à la curatelle et à la tutelle qui sont des mesures durables. La sauvegarde de justice se prononce généralement dans l’attente de la mise en place d’une mesure plus complète.